Crypto-Patrimoine : Newsletter sur les actifs numériques #34

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Newsletter du 14/03/2023

Vous trouverez ci-dessous un dossier consacré à la crise du secteur bancaire américain. Au programme :

  • L’affaire Silvergate
  • L’affaire Silicon Valley Bank
  • Les répercussions sur les marchés financiers traditionnels
  • Les répercussions sur le marché des actifs numériques

 

L’affaire Silvergate :

Silvergate est une banque américaine fondée en 1988. Au cours des années 2010, elle s’est progressivement tournée vers les actifs numériques, notamment à travers le dépôt de cryptomonnaies ainsi que le prêt à des startups liées à cet écosystème.

Comme énormément de banques traditionnelles, Silvergate a investi ses dépôts dans des bons du trésor américain et des titres obligataires à taux fixe dont la maturité est à long terme. Cependant, la crise inflationniste ayant débuté en 2022 ainsi que le relèvement rapide des taux directeurs aux Etats Unis ont fortement fait chuter la valeur de ces obligations avec une diminution de 12% l’année dernière, ce qui est la pire performance enregistrée à ce jour pour ce type d’obligation d’Etat.

C’est cependant l’effondrement de l’un de ses plus gros clients qui va ébranler la banque. En effet, la chute de FTX ainsi que le retrait de plusieurs autres clients vont induire un besoin de liquidités immédiat pour Silvergate. Elle va alors être obligée de liquider une partie de ses actifs avant échéance à une valeur extrêmement basse. Cela va résulter en un dernier trimestre de 2022 catastrophique pour la banque qui enregistre 1 milliard de dollars de déficit.

La banque annonce le 8 mars dernier qu’elle va mettre fin à ses activités et procéder à une liquidation volontaire de son activité. Il y a fort à parier qu’elle se placera sous la protection de l’article 11 de la loi des faillites américaines afin de régulariser sa situation avant liquidation, n’ayant plus de possibilité compte tenu de la taille toujours plus importante de son passif.

 

L’affaire Silicon Valley Bank :

La Silicon Valley Bank, que nous raccourcirons en SVB, est une banque américaine spécialisée dans le financement des startups créée en 1983. Extrêmement plébiscité, la moitié des startups américaines possèderaient un compte à la SVB. Il s’agissait de la 16ème plus grande banque américaine.

C’est cependant un ensemble de facteurs relativement vastes qui va mettre la SVB dans une position délicate. Le relèvement rapide des taux directeurs, mais également la conjoncture des entreprises technologiques dans un contexte macroéconomique et géopolitique très compliqué.

En effet, tout comme Silvergate, SVB s’est fortement exposée aux obligations d’Etat, à hauteur d’environ 91 milliards. Les instabilités liées au contexte macroéconomique ont alors provoqué des retraits importants de la part des startups ces dernières semaines, ce qui a obligé SVB à vendre une partie de ses actifs afin de récupérer des liquidités pour assurer les retraits.

Cette vente massive couplée à des rumeurs d’insolvabilité, a induit ce que l’on appelle un « bank run », une panique bancaire qui a poussé les clients de SVB à retirer massivement leurs dépôts, obligeant SVB à liquider encore plus d’actifs à prix dérisoires. De plus, Greg Baker, le CEO de SVB a liquidé ses actions SVB deux semaines auparavant pour un montant de 3.5 millions de dollars. Daniel Beck, le CFO, a quant à lui vendu pour 575 180 dollars, il s’agirait donc potentiellement d’un délit d’initié, les Etats-Unis ne se sont pour le moment pas encore prononcés sur la question.

Ces facteurs combinés ont donc forcé la FDIC, la Federal Deposit Insurance Corporation, le régulateur garantissant les dépôts bancaires américains, à fermer la SVB vendredi 10 mars. La loi américaine ne garantissant que 250 000 dollars de dépôts, la pression augmente quand fût révélé qu’un peu plus de 95 % des clients de SVB ont des comptes excédants ce montant.

La panique commençant à prendre une tournure contagieuse, c’est le gouvernement américain qui a décidé ce dimanche de garantir les dépôts de SVB afin de rassurer les clients bancaires en proie au doute. La FDIC dans la foulée a décrété la fermeture d’une troisième banque, la Signature Bank, 21ème banque américaine. Les anciens clients de Silvergate s’étaient tournés vers cette banque, le risque était également relativement important.

Pour finir, la FED a décidé de mettre à disposition 25 milliards afin que les banques puissent encaisser des potentiels retraits massifs qui les mèneraient à un sort similaire à SVB. Il s’agit donc d’une mesure de protection vis-à-vis d’un risque de liquidité massif pouvant aboutir à une crise systémique du secteur bancaire par effet de contagion.

Cette crise met également en lumière une gestion des risques pauvre et très agressive de la part de certaines banques par le choix d’obligations étatiques long terme dans un contexte d’augmentation généralisée des taux directeurs.

 

Les répercussions sur les marchés financiers traditionnels :

Sur une semaine, le Nasdaq a encaissé une perte de 5,53 % de sa valeur, le S&P 500 a perdu 3.28 %, le Dow Jones quant à lui a enregistré une perte de 4.80 %.

Concernant les autres indices, le CAC40 a enregistré une perte de 3.95 %, il faut cependant relativiser en tenant compte de la performance exceptionnelle de l’indice sur ce premier trimestre 2022, enregistrant une hausse de 6.32 % depuis le début d’année et atteignant son plus haut niveau historique la semaine dernière à 7401 points. Le FTSE 100 a perdu 5.05 %, le DAX a perdu 3.31 %, le NIKKEI 225 de son côté a accusé une baisse de 3.60 %.

Concernant les banques, Bank of America a encaissé une baisse de 13.48 % sur une semaine, sur un mois elle a cependant perdu près de 20%, JPMorgan Chase & Co a baissé de 5.32 %, et Wells Fargo & Co a baissé de 13.56 % elle a cependant chuté de 20.75% sur un mois. Société Générale a accusé une baisse de 11.88 % sur une semaine, BNP Paribas a baissé de 12.42 %, le Crédit Agricole a baissé de 7.56 %. La Deutsche Bank a baissé de 12.13 % et Barclays a subit une perte de 12.67 % sur la même période.

Cette crise a donc fortement touché le cours des grandes banques occidentales. La correction est certes très importante, mais contrebalancée par un début d’année extrêmement bon pour le secteur bancaire.

Comme dans tout mouvement de panique bancaire, beaucoup d’investisseurs se sont réfugiés dans l’or. Le marché de l’once d’or a donc positivement évolué fasse à cette crise en augmentant de 4.89 % sur une semaine.

Graphique du cours de l’once d’or sur 5 jours

Graphique du cours de l’once d’or sur 5 jours

 

Les répercussions sur le marché des actifs numériques :

Si le début d’année avait été relativement profitable pour le secteur, la fin du mois de février et le début du mois de mars fut beaucoup plus mitigés.

La capitalisation boursière totale des cryptomonnaies était montée à 1 185 milliards de dollars mi-février pour redescendre progressivement à 1 076 milliards de dollars. La répercussion a été tout d’abord relativement importante à l’annonce de Silvergate, la capitalisation a donc chuté à 959 milliards de dollars samedi 11 mars, elle est cependant remontée à 1 116 milliards de dollars aujourd’hui, ce qui est un rebond relativement important.

Graphique de la capitalisation boursière totale des cryptomonnaies sur 30 jours

Graphique de la capitalisation boursière totale des cryptomonnaies sur 30 jours

Concernant Bitcoin, avec un haut à plus de 25 000 dollars à la mi-février, la chute fut progressive pour varier aux alentours des 22 500 dollars début mars. L’annonce de Silvergate et d’une régulation plus forte du secteur par les Etats-Unis a tout d’abord fait chuter le cours en dessous du seuil des 20 000 dollars. L’annonce de Joe Biden a cependant rassuré les investisseurs, le cours est donc remonté aux alentours des 24 500 dollars.

Graphique du cours du Bitcoin sur 1 mois

Graphique du cours du Bitcoin sur 1 mois

Cette crise a surtout mis en lumière un risque inhérent aux stablecoins centralisés notamment l’USDC et par extension le DAI. En effet, l’USDC est un stablecoin adossé au dollar et géré par la société Circle.

Cependant, une partie du collatéral, c’est-à-dire les dollars censés pouvoir couvrir l’USDC étaient déposés dans la banque SVB à hauteur de 3.3 milliards de dollars. Les dépôts ayant été temporairement bloqués, un vent de panique a soufflé sur l’actif qui a progressivement « depeg », c’est-à-dire a décroché de sa valeur de référence qui est le dollar.

Ayant atteint un cours de 0.87 dollar au plus bas, il a fallu attendre les annonces de garantie des dépôts par Joe Biden dimanche pour voir son cours retourner progressivement à celui du dollar. Il est revenu aujourd’hui à 0.9982 dollar.

Graphique du cours de l’USDC sur 7 jours

Graphique du cours de l’USDC sur 7 jours

Le DAI est également un stablecoin adossé au dollar, mais collatéralisé directement avec de l’USDC. Ainsi, le depeg de l’USDC a fatalement provoqué le depeg du DAI qui est descendu à 0.88 dollar. Il est aujourd’hui remonté à 0.9986 dollar.

Graphique du cours du DAI sur 7 jours

Graphique du cours du DAI sur 7 jours

C’est d’autres stablecoins centralisés, l’USDD et le FRAX, qui ont également fortement depeg ce week-end avant un relatif retour à la normale aujourd’hui.

Il semblerait donc que le vent de panique soit passé et que les mesures proposées par le gouvernement américain aient fonctionnées sur ces actifs. Cependant, cela met en lumière un risque de contrepartie quant au dépôt du collatéral sur les stablecoins centralisés.

C’est également le stablecoin centralisé BUSD qui est touché indirectement par cette affaire. Le BUSD est un actif initialement émis par Binance et la société Paxos depuis 2019. Cependant, à la mi-février, la NYFDS le département des services financiers a ordonné à Paxos de stopper l’émission du stablecoin « à la suite de plusieurs problèmes non résolus liés à la surveillance par Paxos de sa relation avec Binance par le biais du BUSD ». Le CEO de Binance, Changpeng Zhao avait annoncé la fin progressive du BUSD avec la possibilité de récupérer le collatéral en dollar. La capitalisation boursière du BUSD avait alors fortement chuté, diminuant d’environ 50 % en 30 jours.

Graphique de la capitalisation boursière du BUSD sur 30 jours

Graphique de la capitalisation boursière du BUSD sur 30 jours

Suite à la crise de ce week-end et la panique qui s’est emparée du secteur, Changpeng Zhao a décidé de liquider son fonds d’urgence pour l’écosystème des cryptomonnaies créé suite à l’affaire FTX. Initialement en BUSD les fonds ont été convertis en BTC, ETH et BNB.

Il semblerait donc que certains des plus gros acteurs de l’écosystème privilégient d’autres solutions jugées ironiquement plus stables que les stablecoins centralisés, cela expliquerait également la reprise de Bitcoin, conjuguée à une arrivée importante de nouveaux investisseurs dans l’écosystème suite à cette crise.

Pour conclure, il y a de fortes chances pour que la prochaine augmentation des taux directeurs américains soit plus basse que prévu à 0.25 % pour ne pas fragiliser encore plus l’exposition des banques.

Cette crise n’engage également rien de bon quant à la régulation américaine qui se voulait depuis le début de cette année très dure contre les actifs numériques. En témoigne Binance, qui se voit passer au crible sur divers affaires par la justice et le régulateur américain.

Joe Biden réclamait le mois dernier un encadrement mondial harmonisé du secteur, il semble aujourd’hui relativement plausible que les Etats-Unis enfoncent encore plus le clou sur l’écosystème suite à cette crise.

Comprendre la blockchain Ethereum et ses utilités

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Qu’est-ce que la blockchain Ethereum, son fonctionnement et sa technologie

Ethereum est une blockchain décentralisée co-créée en 2014 par Vitalik Buterin alors âgé de 20 ans.

L’objectif en créant la blockchain Ethereum est d’élargir les possibilités par rapport à ce qu’apporte déjà la blockchain bitcoin.

Effectivement, bitcoin se veut avant tout comme une blockchain transactionnelle et pour le stockage de valeur. La blockchain Ethereum se voit davantage utilitaire en permettant à l’utilisateur de se connecter à un écosystème d’applications décentralisées.

ETH est le token natif de la blockchain Ethereum, il n’a pas de limites d’émission définies. Cela signifie dans la théorie qu’il peut exister une infinité de jetons ETH. Cependant, l’émission est contrebalancée par un mécanisme de destruction monétaire permettant parfois une situation déflationniste.

Comme pour la blockchain bitcoin, les transactions de la blockchain Ethereum sont validées de manière décentralisées. Jusqu’au 15 Septembre 2022, les transactions étaient validées par des mineurs avec la preuve de travail. Depuis la mise à jour The Merge c’est la technologie de la preuve d’enjeu qui a pris le relai. La preuve d’enjeu est beaucoup moins énergivore que la preuve de travail (minage) de Bitcoin. Pour cause, elle ne nécessite pas la résolution d’un calcul complexe. À la place, elle nécessite de bloquer sur la blockchain d’un certain nombre d’ETH (32 ETH minimum). Bloquer ses jetons ETH afin d’avoir le droit de sécuriser les transactions et ainsi d’obtenir un rendement. Ce mécanisme particulier se nomme le « staking ».

 

Quelles sont les utilités de la blockchain Ethereum et pourquoi cela a de la valeur ?

 

Il est important de comprendre que la valeur du token ETH et du réseau sont intrinsèquement liés. Il en va de même pour la plupart des jetons natifs de blockchain.

Contrairement à Bitcoin qui est une blockchain purement transactionnelle, la valeur d’Ethereum repose sur la souplesse et la sécurité de sa technologie dans l’hébergement de projets novateurs.

Citons par exemple :

-Les contrats intelligents : ce sont des contrats juridiques digitalisés dont les clauses s’exécutent automatiquement lorsque les conditions d’exécutions sont atteintes. ils permettent d’exécuter des transactions entre deux entités suivants un certain nombre de règles prédéfinis de façon automatique et autonome. C’est-à-dire sans un tiers de confiance chargé de son exécution.

Les exemples d’utilisations sont diverss et variés : déposer automatiquement des liquidités dans un protocole, standardiser l’échange de deux tokens différents; voter dans une DAO, ou encore la fabrication de l’ensemble des produits financiers de l’écosystème crypto.

-L’émission de tokens / financement participatif (ICO) : tout le monde peut créer un projet, émettre son token sur la blockchain Ethereum et tenter de le vendre pour se faire financer.

-L’interopérabilité : elle permet de connecter différentes solutions technologiques entre elles. Elle est notamment utile pour les échangeurs décentralisés (DEX) et les portefeuilles intégrant à la fois les tokens classiques répondants aux normes techniques ERC-20 (norme technique des jetons Ethereum) et les tokens non-fongibles (NFT) aux normes ERC-721.

En comparaison, des jetons développés sur la blockchain Binance possèdent la norme BEP20. Pour une utilisation variée, il est important que la norme ERC-20 et BEP-20 puissent être compatible.

-La traçabilité, le pseudonymat et la transparence : comme pour bitcoin, la blockchain Ethereum permet de suivre toutes les transactions qui y sont effectuées et par quels portefeuilles elles sont effectuées. Une fois de plus comme pour la blockchain bitcoin les transactions sont immuables.

 

-Comment acheter de l’ethereum ?

Il existe deux manières d’acheter des ethers, les plateformes centralisées (CeFi) et les plateformes décentralisées (DeFi).

Les plateformes centralisées : il s’agit d’entreprises faisant office de tiers de confiance afin d’acheter et vendre des crypto actifs. Cela simplifie la vie de l’utilisateur, notamment en permettant de déposer directement des monnaies traditionnelles pour les convertir en crypto actifs.

Les risques : L’aspect centralisé de ces plateformes possède un risque sur la gestion de la société en elle-même. Par exemple, certaines de ces plateformes ont déjà utilisé et perdu les fonds de leurs clients pour investir elle-même sur les marchés. De nombreux exemples de gestion désastreuse de ce type de sociétés mettent régulièrement à mal le marché.

 

Les plateformes décentralisées : Ce sont de plateformes codées par des développeurs informatique sur la blockchain, ainsi le code est public et les processus aussi. Dans ce cas, vous vous affranchissez totalement des tiers de confiance et les transactions seront généralement moins chères. En revanche, l’utilisation est moins intuitive et il faut posséder son propre portefeuille.

Risques : A l’inverse d’une plateforme centralisée avec un service d’après-vente (hotline), vous êtes livré à vous-même lorsque vous êtes confrontés à des plateformes décentralisées :
• avoir la capacité de détecter des problèmes dans le code informatique,
• ne pas perdre sa clé privée et phrase de récupération,
• avoir la rigueur de vérifier les adresses auxquelles on envoie des fonds pour éviter les erreurs entre autres.

De plus, il est possible pour tout le monde de créer une plateforme décentralisée, attention donc aux plateformes que vous utilisez !